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Egalité de genres

Bulletin 60 de CELEM (Chrétiens et Libres en Morbihon)

PETITE HISTOIRE DU MARIAGE
Il est bon de rappeler que l'organisation sociétale du monde est évolutive, avec des pratiques très variées selon les époques, les territoires. La plupart des peuples ont connu le patriarcat., mais le matriarcat polyandrique (femme dominante avec plusieurs maris) a existé.
En Occident, le mariage reste longtemps une cérémonie privée, le père 'donnant' sa fille à un homme, mais une bénédiction est parfois donnée. A l'époque romaine, on instaure un contrat juridique légalisant la vie du couple
Après le IVsiècle, le christianisme, devenu religion d'état, impose progressivement sa conception du mariage exclusif, fidèle et indissoluble.
En 1215, au concile de Latran, le mariage est déclaré sacrement.
En 1563 le concile de Trente précise que le mariage doit être célébré devant un prêtre et consigné sur registre paroissial. Il interdit la cohabitation hors mariage.
Mais longtemps, la célébration continue selon les coutumes familiales, hors liturgie ou contrat.
Bien plus tard, les représentants de l'Église deviennent témoins du consentement mutuel des époux.
Le mariage d'amour par choix mutuel est encore plus récent. Jadis on pouvait se trouver mariés et s'aimer après, aujourd'hui on s'aime d'abord et après on se marie...ou pas
P Guimard

QUEL AMOUR ?
« AMOUR » sert à désigner des attachements si différents  ! On peut aimer le grand air, les frites, sa belle mère, son conjoint, son travail, Jésus Christ... Personnellement, je ne suis pas mécontent de trouver un terme unique pour dire et l'amour de Dieu et l'amour d'une personne et l'amour d'une chose. Cela rappelle aux créatures que nous sommes que les choses les plus spirituelles s'enracinent dans les plus charnelles, les plus palpables (quand on connaît la tendance à idéaliser les liens amoureux, supposés être parfaitement purs et sans rapport avec les requêtes les plus primaires de notre être corporel, cet animal raisonnable). L'amour authentique, lui, sait qu'il a toujours quelque chose à voir avec l'animalité qui est dans la personne. Pourtant, avant de dire «  il suffit d'aimer  », il faut distinguer les trois formes de l'amour  :
l'amour passion (eros) / l'amour d'amitié (philia) / l'amour sans condition (agapé)
la passion est habitée du désir de capturer l'autre, de le posséder pour conforter l'image rêvée de soi-même, pour combler un manque. L'amitié, au contraire, est suscitée par les qualités de l'autre qui m'attirent et ouvrent des horizons nouveaux ; aussi instaure-t-elle une relation de partage où chacun se sent reconnu et aidé dans son métier d'homme. L'amour sans condition, quant à lui, n'est pas au dessus des situations humaines habituelles, des tumultes, de l'attirance  ; cependant il prend à bras le corps les réactions passionnelles et les préférences amicales pour les travailler, les rendre plus conformes à la quête d'humanisation que doit mener toute personne. Il devient alors capable de s'exprimer même envers l'ennemi et envers celui ou celle qui n'a plus rien d'attirant.
Tête chercheuse de la dignité humaine, là-même où celle-ci semble le plus absente ou foulée aux pieds, voilà l'amour-agapé, l'amour de l'autre, du prochain. D'après Xavier Thévenot, théologien
Mon fils est homosexuel (ed St Augustin- 2001)
Dieu créateur, Dieu marieur ?


Tout un chacun croit connaître le verset traduit par « homme et femme il les créa » dans les versions les plus courantes, et qui fut la clé de voûte de la théologie de l'amour et de la sexualité de jean paul II. Mais regardons de plus près les premiers récits de la Genèse, dans la traduction de Chouraqui, littérale, presque étymologique.
Dieu, après avoir créé tous les animaux et les plantes « pour leur espèce » (terme répété plus de 10 fois) , crée un être qui n'est pas pour l'espèce, mais « en l'image de nous » : c'est l'humain (adam- celui tiré de la glèbe, terme générique non sexué, qui vient de adama- la terre, comme humain vient de humus- terre en latin),
Elohim crée l'humain en son image, en l'image d'Elohim il le crée, mâle et femelle il les crée.
Dans le texte, ceux qui sont créés « en l'image de nous »  règnent sur ceux qui sont créés pour leur espèce.
Les humains, mâle et femelle, règnent ensemble sur la création , il n'y a pas de règne de l'un sur l'autre.
Quand Dieu se repose le 7è jour, Ils sont toujours à moitié faits, seulement mâle et femelle, « à l'image de Dieu » mais pas encore « à sa ressemblance ».

Ce n'est que dans le deuxième récit, celui du jardin d'Eden, qu'ils deviendront homme et femme. Car il n'est pas bon que l'humain soit seul. Ce n'est plus de la terre mais de l'humain lui-même que peut être tirée cette « aide » vitale que Dieu propose à l'humain (« ezer », mot utilisé pour exprimer le secours divin qui sauve de la mort). A son réveil, à sa deuxième naissance, l'humain est deux. Dieu les présente l'un à l'autre, comme un marieur, ces deux inconnus. Les noms d' « homme », « ish » et de « femme », « isha » , les humains se les donneront eux-même : en effet, c'est en reconnaissant la femme comme « isha » qu'Adam (maintenant personnalisé, peut se connaître lui-même comme « ish ». Dans cette perspective, l'interdit de manger de l'arbre de la connaissance, qui apparaît bizarrement juste avant la naissance de l'homme et de la femme, ne peut-il être considéré comme la première loi, fondatrice de la parole et de la relation, la loi sans laquelle il n'y a pas de différenciation entre les êtres, pas de sujets capables de se rencontrer, l'inter-dit, le dit entre deux, la séparation symbolique entre soi et l'autre, qui permet de se parler sans se confondre et d'accepter le fait que l'autre soit irrémédiablement au delà de ma connaissance ; je ne peux le « manger », le nier, sans me détruire moi-même, sans mourir. Cette loi donne accès à la raison, à la vie dans la parole, à l'alliance, au divin.

Ainsi, autour de la différence biologique, la part reçue de la nature, qui ne fait pas de nous des hommes et des femmes, mais seulement de mâles et des femelles, les êtres humains tissent et retissent depuis l'origine, par leur parole, leurs créations symboliques, leur quête de sens, cette « ressemblance » à Dieu qu'il leur appartient de construire. Et c'est bien Dieu qui a voulu l'avènement de cette étonnante dimension symbolique de l'humanité, tout simplement parce que c'est la condition première de notre libre réponse à son aspiration.
C Bascou
Résumé d'une conférence de Josselin Tricou (2012),
texte intégral dans le hors série n°29 de PARVIS
voir aussi : La divine origine : Dieu n'a pas créé l'homme Marie Balmary (1998)

LES FEMMES AU TEMPS DE JÉSUS
Rappelons que dans le Judaïsme la femme n’est pas un sujet de droit. Dans la Palestine du 1er siècle, seul l’homme peut répudier sa femme, jamais le contraire. Cette dernière est soumise entièrement à l'arbitraire du mari ( en hébreu « baa », le maître). «  Lorsqu'un homme aura pris et épousé une femme qui viendrait à ne pas trouver grâce à ses yeux, parce qu'il a découvert en elle quelque chose de honteux, il écrira pour elle une lettre de divorce, et, après la lui avoir remise en main, il la renverra de sa maison  ». (Deutéronome 24:1  . C'est le seul passage de l'Ancien Testament où le "divorce" est évoqué au sens propre. Le mot 'divorce' est évoqué ailleurs deux fois au sens figuré, dans les reproches que Dieu fait à Israël. C'est tout!)
La lettre de divorce remise à l'épouse répudiée indique que la cause de la rupture n'est pas l'infidélité, ce qui lui évite la condamnation à mort (ce qui serait arrivé à Marie si Joseph l'avait dénoncée  : étant promise à lui, même non mariée, elle lui appartenait). Quant au «  quelque chose de honteux", il s'agit souvent d'un prétexte futile pour pouvoir prendre une autre épouse plus … gracieuse !
Quelles alternatives a la femme répudiée  ? Comment peut-elle assurer sa subsistance et sauver son honneur dans une société faite pour les hommes  ? Faire un second mariage  ? Retourner chez ses parents en leur apportant honte et humiliation  ? S'ils refusent de la reprendre, aller grossir les rangs des femmes perdues et des prostituées alimentaires  !
C Bascou
JESUS ET LES FEMMES
Tout au long de sa vie publique, Jésus manifestera une immense liberté, qui choque son entourage, dans son attitude envers les femmes . Elles ne sont pas pour lui source de tentations, ni de possible contamination. Il s’approche d’elles sans réserve, leur parle, se laisse toucher (même par de femmes dites 'impures'). Jamais il ne les exhorte à être soumises à leur mari ni au système patriarcal, contrairement à ce qu’on pourra entendre dans les communautés chrétiennes primitives par la suite . Il n’y a chez Jésus aucune méfiance à leur égard, seulement respect, compassion et amitié .
Ce qui étonne le plus c’est sa façon particulière de redéfinir simplement, naturellement, le sens et la place de la femme à partir de son expérience du Père comme tout amour pour chaque être humain. Aussi est-il particulièrement sensible aux injustices faites aux femmes à son époque, c'est pourquoi, alors que jamais il ne prévient les disciples contres les artifices de séduction de la femme, il les met en garde contre le regard dévoyé qu’eux-même pourraient porter sur les femmes: ‘Quiconque regarde une femme pour la désirer a déjà commis dans son cœur l'adultère avec elle’ (Mt 5,27-28).


JESUS ET LE DIVORCE
Dans le Nouveau Testament, on trouve 3 fois le mot "divorce", (Matthieu 5:31, Matthieu 19:7 et Marc 10:4) « Moïse, dirent-ils, a permis d'écrire une lettre de divorce et de répudier sa femme. ». Jésus leur répond: 1) « C'est à cause de la dureté de votre cœur que Moïse vous a donné ce précepte. Tout d'abord, Jésus interpelle les hommes en dénonçant le privilège que les mâles se sont octroyés en créant des structures qui engendrent la soumission de la femme, la privant d' une vie digne et stable
2) « Mais au commencement de la création, Dieu fit l'homme et la femme; c'est pourquoi l'homme quittera son père et sa mère, et s'attachera à sa femme, et les deux deviendront une seule chair. Ainsi ils ne sont plus deux, mais ils sont une seule chair. Que l'homme donc ne sépare pas ce que Dieu a joint. » (voir en encadré la traduction plus littérale)
La référence de Jésus à la parole de la Genèse (Gn 1-2) vient redonner à l’être humain , homme et femme, la beauté originelle voulue par Dieu, l’égale dignité, l’égale responsabilité. il est utile que Jésus ait rappelé le point 1 ( le fait que Moïse ait tenu tient compte de la « dureté de notre cœur » pour adapter la loi), tout en gardant l’idéal du 2, à la fois inspirant, mais en même temps non culpabilisant.
En conséquence, si nous faisons résonner cette parole de Jésus avec le reste de son enseignement , elle n’a certainement pas valeur de norme légaliste, elle est un appel à la conscience, au respect de l'autre, à une cohérence de vie évangélique.
Le vœu de l'amour sera toujours que les couples restent unis la vie durant.
Accepter un nouveau mariage pour des divorcés (comme le font les Églises orientales dans leur pratique) ne paraît donc pas si contraire aux textes fondateurs et ne remet pas en question cet idéal, ce principe de fond.
Dossier constitué par CB

 


Encadré
Ayons la franchise d'avouer que Jésus ne dit rien du divorce ni du remariage, ne prêche aucune indissolubilité du couple comme aucune 'morale sexuelle', ni ne condamne, ni n'exclut ; il rappelle simplement que l'homme et la femme sont égaux !
« CE QUE DIEU A ATTELÉ À ÉGALITÉ SOUS LE MÊME JOUG,
QUE L'HOMME NE LE FASSE PAS INÉGAL » (Mc 10,6, régulièrement mal traduit) Jacques Bufquin


Affiché dans un presbytère
« Divorcés remariés,
vous avez connu la souffrance d'une rupture,
vous avez eu le courage d'un nouvel amour;
ce n'est pas vous qui devriez avoir honte, mais ceux qui vous jugent »


SEXUALITE ET MORALE

La sexualité a une place importante dans l'existence de chaque individu et pourtant elle fait rarement l'objet de réflexion et d'échange.

A l'époque de mon enfance et de mon adolescence (autour de la guerre de 39-45), mes parents qui avaient grand souci de mon éducation n'ont jamais abordé avec moi quelque aspect ou problème relatif à la sexualité. Et c'était ainsi dans toutes les familles. Comme si c'était malséant... Pourquoi ? On n'osait pas ...On ne savait pas comment faire...C'était l'occultation totale. Les jeunes filles étaient sans doute censées arriver au mariage comme des « oies blanches » et les garçons restaient en attente du service militaire pour être « déniaisés ».
Devant la plupart des éducateurs chrétiens et des prêtres, il était des mots qu'il ne fallait pas prononcer. On était amené à se culpabiliser d 'être effleuré par de « mauvaises pensées ». L'éveil des sens chez un adolescent était une période trop difficilement vécue. Pour faire l'expérience d'une métamorphose, le pauvre était bien rabroué et culpabilisé. Je me souviens qu'en classe de 1ère, interne chez les Frères, j'ai failli être renvoyé pour avoir chanté «  Perrine était servante ». Heureusement, j'ai rencontré un aumônier d'étudiants qui, parlant clair, m'a apaisé et réconforté. « Si tu es tracassé par l'éveil de ta sexualité, me disait-il, ne t'affole pas. Tu découvres ta sexualité, alors tu la maîtrises dans la joie, tu loues le Seigneur. C'est un grand cadeau qu'Il te fait et qui te permettra d'aimer. »
Vis à vis du monde adulte, l'attitude de l'Eglise était de même, soit refuge dans le silence, soit devant les difficultés avérées, réprobation ou sévère jugement. Je ne sais comment les couples chrétiens pratiquaient pour assurer un minimum de contrôle de leur procréation. Ces secrets n'étaient jamais partagés. Je suppose qu'on s'arrangeait comme on pouvait... avec la capote anglaise et le coït interrompu. On gérait ainsi au mieux les naissances non souhaitées. «  Bienheureuse ménopause ! »  pouvait soupirer une femme qui, dans un langage retenu, disait qu'elle « ne voyait plus. »

Puis survint une véritable révolution des mœurs lors de l'époque charnière des années 60 dont l'acmé se manifesta par la tourmente de 68. « Lâchez-vous »... »… « Plus de contrainte »... « Faites l'amour »... »… « Il est interdit d'interdire »... Le tournant était peut-être utile , mais il a été brutal. Quelques uns en sont restés déséquilibrés, inadaptés. Les plus jeunes générations en ont été beaucoup marquées, c'est normal. Et le dialogue avec la génération de leurs parents est devenu bien difficile sinon impossible sur les problèmes moraux notamment, surtout ceux relatifs à la sexualité.
De plus, les avancées scientifiques permettaient de ne plus lier la relation sexuelle et la reproduction. On pouvait désormais avoir une relation sans conception avec les moyens de contraception, et réciproquement une conception sans rapport sexuel. Et avec l'allongement de la vie, on a découvert que la vie sexuelle peut continuer longtemps après la ménopause de l'épouse. La personne âgée a du désir et elle doit rester désirable. En tenant compte, bien sûr, des conséquences liées au vieillissement de la fonction, le couple âgé a toujours besoin de sa sexualité pour continuer à construire jusqu'au bout son amour conjugal. Pour cela, on a droit à une vie de couple qui a doublé en durée.

Les tabous étant levés, l'homosexualité a pu se dire. On reconnaît que le phénomène existe, on en parle. On estimait qu'il y avait un adulte homosexuel sur 25 en France en 1986 (Xavier Thévenot) . Et depuis quelques années, on découvre qu'il faut peut-être distinguer ce qui revient à l'identité sexuelle et à l'identité du genre, ce qui revient au capital biologique, soma et germen et ce qui revient à la construction sociale. La différence des sexes est incontestablement et dès la conception le résultat d'une donnée biologique acquise et irréversible dont on ne peut s'affranchir. Mais, peut-être, pour certains, l'effet d'une éducation, d'un conditionnement social et culturel peut orienter une personne physiquement et psychologiquement vers un partenaire du même sexe. Face à un homosexuel, il faut comprendre et toujours accueillir, car il ne s'agit pas d'un homosexuel mais d'une PERSONNE homosexuelle. Homosexualité ne signifie pas perversion. Et à ce propos, on ne comprend pas pourquoi l'Église, qui de toute façon impose la chasteté dans le célibat avant l'ordination à la prêtrise, récuse les candidats homosexuels.

Dans le contexte scientifique, culturel et social du XXIè siècle, la fidélité a plus de risques  d'être malmenée. Comme au travail, nous sommes là aussi dans un monde de contrats à court terme. Et même si on finit par officialiser un temps la cohabitation par le mariage, celui-ci est rompu plus tard une fois sur deux.
Par ailleurs, le tabou levé de la sexualité dans notre société bien permissive nous vaut d'être victime de son intrusion à notre domicile dans tous ses dérapages, avec la commercialisation par le support du sexe, la commercialisation du sexe lui-même.
Cette banalisation, ce mésusage du sexe, ce matraquage sur le petit écran et internet, sont responsables de désarroi chez nombre de jeunes s'ils n'ont pas en contrepartie éducation et soutien.

LES POSITIONS DE L' ÉGLISE SUR LE MARIAGE

Basées sur l'indissolubilité et la fidélité, elles ont incontestablement un enracinement évangélique. Mais, en ce qui concerne la fécondité, on ne trouve aucune allusion dans l'Évangile. Ce qui n'a pas empêché le Magistère de fixer des règles précises relatives à la fécondité, la procréation devant être « la fin première » du mariage. L' Église s'est arc-boutée sur un distinguo subtil et discutable entre les méthodes de régulation naturelle des naissances et les méthodes artificielles, c'est-à-dire celles qui contrarient le processus physiologique et entravent la procréation.(« Humanae vitae », de Paul VI en 1968 réaffirme l'interdiction de la contraception, norme confirmée plus tard par Jean-Paul II )
On pourrait se poser la question : les méthodes 'naturelles' sont-elles vraiment si naturelles ? A ce propos, Marc Oraison qui avait beaucoup d'esprit disait «  Qu'il s'agisse d'un thermomètre, d'une pilule ou d'un disque, on introduit toujours un artifice quelque part ».
D'autre part, il semble regrettable de lier l'approche sexuelle à des phénomènes physiologiques (méthode des températures préconisée dans les années 50-60, méthode Billings basée sur l'observation de la glaire cervicale etc...) alors que la sexualité doit être une réponse spontanée et partagée des partenaires à des moments ressentis comme une source de rapprochement. La relation conjugale est en effet aussi un événement spirituel et affectif.
Enfin, les foyers peuvent témoigner que les méthodes dites naturelles de régulation des naissances ne sont pas suffisamment fiables et nécessitent une maîtrise que beaucoup n'ont pas. Alors que les contraceptifs d'aujourd'hui apportent leur efficacité, leur innocuité, leur facilité d'administration.
N'est-il pas bon parfois d'intervenir sur la loi biologique pour le plus grand bien de l'homme ? Ne pourrait-on pas s'en remettre à la conscience du chrétien adulte éclairé ? La Commission familiale de l'Épiscopat français a d'ailleurs rappelé que « la conscience personnelle constitue le juge et la norme ultime de la moralité. Aucune autorité humaine, pas même le Magistère de l'Église, ne peut se substituer à la conscience personnelle. »
En 1994, un document a été remis au Vatican par les foyers des Équipes Notre-Dame, fruit d'une sérieuse enquête à travers le monde. Près de 10 000 foyers chrétiens engagés dans ce mouvement y ont participé. Le rapport « demande à l'Église avec insistance, non pas de dicter des règles absolues qu'il faudrait accepter même sans comprendre, mais avant tout de former les consciences. » A notre connaissance, il n'y a pas eu de réponse officielle publiée à cet appel pressant.
L'Église catholique s'enferme toujours dans une attitude rigide sur ces problèmes de morale. Alors, les générations actuelles de laïcs chrétiens ne prennent pas en compte les injonctions du Magistère. Les laïcs chrétiens, jeunes et adultes font ...comme les autres : les pratiques sexuelles sont précoces, les cohabitations pré-conjugales presque de règle, le mariage est en régression, le divorce est fréquent (et les divorcés remariés vont recevoir l'Eucharistie qu'on ne peut leur refuser) et la contraception est généralisée à presque tous les foyers, etc... Notre Église catholique ne sait plus quoi dire.


PROPOSITIONS
A partir de l'Évangile, quelle position morale l'Eglise peut-elle proposer en ce qui concerne la sexualité pour les générations de notre XXI ème siècle ?
Ne pas dissocier sexualité et amour.
D'abord redire que la sexualité est un don du Créateur fait à l'homme . Ce don lui est accordé pour être au service de l'amour. Par ailleurs, la relation sexuelle n'a pas à être liée obligatoirement à la reproduction, «  le plaisir sexuel est bon en soi, pourvu que l'on ne se fasse pas de mal à soi-même, qu'on ne fasse pas de mal à l'autre, ni ne fasse du mal à une tierce personne. » (José Arregui). A ces conditions, il faut bien sûr ajouter que lorsqu'on engage son corps, on engage sa personne sans restriction et cela ne peut s'envisager que dans la fidélité de l'un et de l'autre. Le plaisir sexuel a été offert à l'homme et à la femme pour leur épanouissement. Dieu se réjouit devant le plaisir des corps et des âmes.
Le critère moral n'est pas à trouver dans des discussions byzantines sur les méthodes contraceptives naturelles ou pas, mais dans la qualité de l'attitude qui doit être don, non pas injonction à la jouissance obligée, mais moyen d'expression d'un amour oblatif et non captatif.

Il faut réinventer la fidélité et la générosité, non à cause d'une morale imposée mais par respect pour soi-même et pour l'autre. Ce retour à une telle conception peut-être libérateur.
L'engagement matrimonial doit être vécu par les deux conjoints comme une fidélité promise mutuellement, fidélité à conforter chaque jour : fidélité à la parole donnée, fidélité à soi-même, fidélité à l'autre. C'est un appel à plus et à mieux être. C'est une route parfois difficile et exigeante, un chrétien peut dire que c'est une route de sainteté. Mais il sait que son Dieu est juste, qu'Il est infiniment bon et source d'amour, et qu'Il sait pardonner.
La sexualité est un cadeau fait à l'homme, non pour son asservissement, mais pour son épanouissement dans le don et la fidélité.
Pierre GUIMARD

Célibat des prêtres
Bien des chrétiens ignorent que le célibat des prêtres n’a aucun fondement théologique et n’est qu’une règle de discipline que l’Eglise catholique romaine impose à ses ministres ordonnés et qui fut instaurée en l'an 1139, au 2ème Concile du Latran. Combien savent que, après Pierre, 5 papes au moins étaient mariés, avec enfants, 11 étaient fils de pape ou de prêtre, sans compter les 6 papes qui eurent des enfants illégitimes bien après 1139 ? ... Et puis le système s'est gelé à la fin du Moyen Age, sur des positions philosophiques dénigrant la matière, le corps, opposés à la pureté de l'esprit, mais surtout pour de sordides questions d'héritage et de biens d'Eglise que les familles des prêtres auraient pu capter.
Alors, à quand le dégel  de l' image déformée et déformante d’une grande partie des chrétiens sur leurs ministres ? Quel gâchis d’énergies à vouloir camper l’image d’un prêtre idéalisé, sacralisé, asexué et amputé théoriquement de tout besoin affectif , image démentie par la réalité et paradoxalement bien moins humaine que celle de  Jésus lui même,  quand il marchait sur la terre des hommes! C B

« Certes, il incomberait aux prêtres eux-mêmes, d’œuvrer pour que soit enfin brisé le carcan dans lesquels les a enfermés une vision  «  intégriste  » de leur fonction, génératrice de mensonges, de situations fausses et de souffrances en tous genres (celles de beaucoup d’entre eux, mais aussi d’autant de femmes qu’il y a de prêtres concernés !). Il leur suffirait pour cela de témoigner en public de ce qu’ils vivent.
Pourtant, très peu osent le faire, car ils seraient aussitôt mis en demeure par leur hiérarchie de choisir entre renoncer à leur relation avec une femme ou quitter leur fonction. C’est donc à celles de leurs compagnes qui peuvent et osent le faire, de parler. L’association PLEIN JOUR [leur] a permis de sortir de l’ombre et par là même de faire avancer la réflexion sur l’un des aspects de la future réforme en profondeur des ministères que même les tenants de l’immobilisme ne pourront éviter, dans un avenir relativement proche, ne serait-ce que du fait de la pénurie des effectifs. »
 http://plein-jour.eu

RESPECT DE LA VIE
Oui, mais alors de la vie humaine dans toutes ses dimensions, et d'abord les plus nobles, affectives, économiques, sociales et spirituelles! Nous serions bien inspirés, en Eglise, d'élever le sens que nous pouvons donner à cette vie humaine. Or, le discours ecclésial s'en tient à un seul critère, restrictif: celui de la biologie, commençant par la rencontre fortuite de deux cellules, la fécondation. Celle ci est pourtant loin de suffire à définir biologiquement la vie, puisque 80% des oeufs fécondés sont éliminés naturellement. Lui succède la nidation,qui permet la relation à un environnement nutritionnel (placenta)et humain(la mère): car que serait une vie sans relations avec son environnement? Plus déterminantes encore sont la différenciation cellulaire et surtout la solidarité intercellulaire, qui seule peut faire du corps biologique un corps vivant, fonctionnel, différencié et non une tumeur(nous pouvons d'ailleurs en extrapoler que que la condition première de toute vie humaine est la solidarité de notre corps social dans la différence de ses membres).... Enfin, à la naissance, le passage de la respiration aquatique à la respiration aérienne achève de sceller l'intégration du nouveau venu dans notre communauté humaine... A l'autre bout de la chaîne, le même enjeu est de savoir ce qu'il reste de la vie au delà de l'arrêt du fonctionnement biologique...

Sortir du tout biologique nous ferait reconsidérer les références un peu trop rapides à la loi dite "naturelle".
Quelle est elle? Celle de la survie, où les animaux s'accouplent spontanément dans le seul but de perpétuer leur espèce, celle où les gros prédateurs mangent les plus petits et les plus fragiles qu'eux, est-ce vraiment de cette loi là que nous rêvons pour nous? Ou celle que nous pouvons créer en nous organisant collectivement, pour que chacun y ait sa place et puisse vivre et grandir dans le respect et le service des autres?
extraits de Un prêtre sur les parvis
Michel Deheunynck (médecin et prêtre)
selectionnées par CB
LETTRE AU PAPE FRANCOIS
"Pape François, Nous sommes nombreux à vouloir vous dire notre soutien et notre reconnaissance pour tous les efforts que vous faites afin que l’Eglise catholique rencontre son temps.
Vous ne ménagez pas votre peine pour ouvrir des portes aux familles de nos sociétés modernes  : familles divorcées, sans enfants, monoparentales, recomposées, de même sexe! [...]
Vous l’avez dit vous-même, ce n’est pas la discipline qui doit prévaloir, mais la miséricorde. N’est-ce pas le comportement habituel de Jésus dans toutes ses rencontres sur les chemins de Palestine  ?

Le rôle de l’Église est d’accompagner, de soulager, d’encourager et non pas d’imposer des fardeaux que nous-mêmes, ses responsables, ne portons pas. Il semble tellement plus évangélique d’accueillir les personnes telles qu’elles sont et non pas telles qu’elles devraient être  !
C’est l’honneur de l’Église que des chrétiens, que des prêtres aient depuis longtemps ouvert des portes. Ils ne sont pas partis des principes mais des couples qui, de fait, sont exclus du sacrement et de la communion avec les autres chrétiens. Ils reconnaissent avec bienveillance l’amour qui est vécu chez des couples hors normes.
Ils ne se réfugient pas dans la doctrine en tenant un discours normatif, mais ils se mettent à l’écoute et portent un regard positif sur ces nouvelles formes de familles dont la vie au quotidien n’est souvent pas facile. Le mariage civil est reconnu positivement. Des divorcés remariés sont accueillis et communient. Des responsabilités leur sont confiées. Des couples homosexuels sont reconnus et estimés. Leur mariage est béni. Et leurs enfants sont baptisés. Dans les périphéries de l’Église existe un climat de tolérance et de respect où les exclus sont les premiers invités à la table eucharistique.

C’est un changement majeur qui peut faire peur. Il ne s’agit pas d’accepter tout ce qui se fait, mais de partir des situations de vie telles qu’elles sont et de faire courageusement un pas en avant sur un chemin nouveau où se trouvent ceux et celles qui se sentent marginalisés par l’Eglise.

Merci pape François de nous réjouir par votre audace évangélique  : «  Dieu est le Dieu de la Loi. Il est aussi le Dieu des surprises. Laissez-vous surprendre par Dieu. Dieu n’a pas peur de la nouveauté.  ». Ce sont vos paroles. L’avenir est ouvert. Avec notre affection et notre respect."
Jacques Gaillot, Évêque de Partenia